Biographie Chasse Marie-Louise
Marie-Louise, Impératrice du monde 117 ans le 29 août dernier, Marie-Louise Meilleur, qui est née en 1880 à Kamouraska, sur les bords du Saint-Laurent, prend aujourd'hui la succession de Jeanne Calment. Mais, à l'inverse de la célèbre Arlésienne, qui n'avait plus de descendants directs, la nouvelle doyenne de l'humanité compte 308 héritiers vivants. Autre différence: alors que Jeanne n'avait jamais travaillé, Marie-Louise, après avoir élevé douze enfants, a continué à trimer comme cuisinière dans un hôtel pour bûcherons du Nord canadien. Son secret de longévité: le travail et la prière. Et peut-être aussi, n'en déplaise aux ligues antifumeurs, le tabac; elle avait 100 ans lorsque, après un gros rhume et sur les conseils de son médecin, elle a consenti à renoncer aux cigarettes qu'elle roulait elle-même depuis plus d'un demi-siècle.
Toute sa vie, elle a eu la cigarette au bec. Mais, à 100 ans, elle a mis fin à ce léger vice. Vibrer devant les matchs de hockey à la télévision, bien installée dans son fauteuil, alors qu'elle a déjà plus de 80 ans, avec interdiction formelle aux personnes qui l'entourent de faire le moindre bruit ou de passer devant l'écran sous peine d'essuyer une de ses colères: c'est le seul plaisir que Marie-Louise Meilleur tire du progrès apporté par le XXe siècle. Cette femme, qui a connu la poussière des routes soulevée par les chevaux, deux guerres mondiales, la crise de 1929, l'automobile, l'avion, le premier homme qui a marché sur la Lune et... la télévision, préfère «le temps d'avant où la vie était bien plus agréable». Cette Québécoise de 117 ans succède à la Française Jeanne Calment sur les traces de Mathusalem. Marie-Louise est officiellement la nouvelle doyenne de l'humanité.
Deux femmes, deux vies. Si l'Arlésienne se targuait de ne jamais avoir travaillé, la Canadienne assure que «l'ouvrage dur ne tue personne». Les épreuves et les lourdes besognes ne l'ont pas épargnée. Marie-Louise Chassé est née le 29 août 1880 à Kamouraska, petite ville sur les rives du Saint-Laurent, au nord de Québec. Son père est cordonnier. Sa mère reste à la maison et s'occupe de ses enfants: Albertine, Napoléon et Marie-Louise. Son frère, à la destinée également remarquable, deviendra le capitaine Napoléon Chassé, célèbre navigateur qui participera à plusieurs expéditions d'explorateurs dans le Grand Nord canadien. Quant à Albertine, dont le sort en apparence ne semble rien apporter à l'histoire, elle jouera pourtant un rôle déterminant dans l'étonnant destin de la future «plus vieille femme du monde».
Deux femmes, deux vies. Si l'Arlésienne se targuait de ne jamais avoir travaillé, la Canadienne assure que «l'ouvrage dur ne tue personne». Les épreuves et les lourdes besognes ne l'ont pas épargnée. Marie-Louise Chassé est née le 29 août 1880 à Kamouraska, petite ville sur les rives du Saint-Laurent, au nord de Québec. Son père est cordonnier. Sa mère reste à la maison et s'occupe de ses enfants: Albertine, Napoléon et Marie-Louise. Son frère, à la destinée également remarquable, deviendra le capitaine Napoléon Chassé, célèbre navigateur qui participera à plusieurs expéditions d'explorateurs dans le Grand Nord canadien. Quant à Albertine, dont le sort en apparence ne semble rien apporter à l'histoire, elle jouera pourtant un rôle déterminant dans l'étonnant destin de la future «plus vieille femme du monde».
Élevée dans la stricte discipline de la religion catholique, Marie-Louise est une jeune fille pieuse. La prière sera toute sa vie sa dame de compagnie. Le regard sombre et franc, le menton fier, dressé légèrement vers l'avant, ce petit bout de femme qui ne mesure que 1,50 mètre a un caractère bien trempé. «C'est une femme très ferme, raconte Jean Bossé, son petit-fils, et qui ne s'en laisse pas compter.». Étienne Leclerc, un pêcheur de son village, parvient pourtant à la séduire. En 1900, alors que le siècle fait figure de nouveau-né, Marie-Louise a déjà 20 ans; Étienne, 28. Ils se marient et ne tardent pas à avoir beaucoup d'enfants: six en tout, dont deux mourront à la naissance. La vie aurait pu suivre ainsi gentiment son cours à Kamouraska, mais, en 1911, Étienne succombe, à 39 ans, de la tuberculose. La jeune femme reste seule, à 31 ans, avec ses deux garçons et ses deux filles. Deux ans plus tard, Albertine, qui s'est installée depuis quelque temps déjà aux Rapides-des-Joachims, à un millier de kilomètres de là, à la frontière entre le Québec et l'Ontario, va changer le cours de l'existence de sa jeune soeur. Elle tient un hôtel dans lequel séjournent les bûcherons qui travaillent sur les chantiers situés plus au nord. Elle a besoin d'une cuisinière. Marie-Louise décide de tenter l'aventure et d'abandonner Kamouraska. Malheureusement, elle ne peut emmener avec elle tous ses enfants. Les deux plus grands resteront donc chez leur grand-oncle Arthur, les deux plus jeunes suivront leur mère. À compter de ce jour, Marie-Louise ne reviendra qu'une seule fois à Kamouraska. Autre lieu, autre vie. Parmi la clientèle de l'établissement, on ne parle pas seulement français. Marie-Louise côtoie des anglophones. Hector Meilleur, originaire de l'Ontario, est contremaître sur un chantier de bûcherons. Il descend régulièrement dans l'hôtel d'Albertine. Hector est veuf, lui aussi. Et il a... quatre enfants. C'est le coup de foudre! Marie-Louise devient Mme Hector Meilleur en 1915. Le couple s'établit dans une petite maison des Rapides-des-Joachims. Une maison qu'en cinquante-sept ans Marie-Louise ne quittera qu'une seule fois.
En 1939, Maurice, l'un de ses fils, la ramène dans sa ville natale pour qu'elle rencontre ses «petits-enfants de Kamouraska». Entre-temps, elle a donné à Hector quatre autres enfants. «Maman a élevé deux familles, raconte Rita, la plus jeune de ses filles, âgée aujourd'hui de 89 ans. Elle était seule la plupart du temps car mon père travaillait dans le bois. Elle devait faire face à tout. Elle ne servait plus à l'hôtel. Nous avions une petite ferme, avec des poules, des vaches, des cochons. Quand elle ne s'occupait pas des animaux, ma mère cousait, tricotait ou brodait... Elle ne pouvait pas rester à ne rien faire. Ses enfants la respectaient et lui obéissait sans broncher. C'était une bonne mère.» À cette époque, Maurice, qui est devenu un homme, initie Marie-Louise «aux délices de la cigarette». Dès lors, elle a toujours une blague à tabac dans la poche de son tablier et l'image que ses enfants ont d'elle est celle d'une femme masquée par un nuage de fumée, «la cigarette au bec», qu'elle a pris soin de rouler. Elle ne met un terme à ce léger vice qu'à l'âge de 100 ans. Sans aucune difficulté, du jour au lendemain, quand son médecin, à la suite d'un rhume, lui conseille d'arrêter. Son autre péché mignon: le soir, après le souper, elle prenait toujours une tranche de pain qu'elle avait cuit elle-même, avec un peu de beurre. Son dessert préféré! Un point sur lequel elle était intraitable: le français. «Nous n'avions pas le droit de parler anglais à la maison, se souvient Rita. Sinon, elle se mettait en colère. C'était important pour elle.»
«Le travail et la prière»: tel est son secret de longévité. Et jamais d'alcool, «c'est diabolique!» Marie-Louise, qui aimait tant Dieu et la religion catholique, repousse tout ce qui peut lui rappeler Satan. Elle a toujours un chapelet à portée de main. Aujourd'hui, elle continue de suivre la retransmission à la télévision de la messe en français. Lors du Carême, elle jeûne comme il se doit et, tous les jours après le souper, la prière se dit en famille. En 1972, âgée de 92 ans, Marie-Louise Meilleur devient veuve pour la deuxième fois. Elle délaisse alors sa petite maison des Rapides-des-Joachims pour s'installer chez sa plus jeune fille, Rita, qui habite Deep River, à quelques kilomètres de là. Rita prend soin de sa mère pendant seize ans. Depuis 1988, Marie-Louise vit dans une maison de retraite à Corbeil, dans l'Ontario. «Elle tenait à son indépendance et voulait toujours tout faire seule, raconte Rita. Elle devenait aveugle mais s'obstinait à écrire, au prix de terribles efforts, à sa famille de Kamouraska. Dans sa dernière lettre, datée de 1982 - Marie-Louise a alors 102 ans -, elle demande à ses petits-enfants de bien vouloir lui envoyer les sardines salées qu'elle adorait tant quand elle était jeune. Dans ces lignes, elle regrette aussi de ne pouvoir connaître l'ensemble de ses descendants. Deux villages. Deux vies. Deux familles, dont la plupart des membres ne se sont jamais croisés. Quatre de ses enfants vivent toujours, de même que 85 petits-enfants, 75 arrière-petits-enfants, 55 arrière-arrière-arrière-petits-enfants et 4 arrière-arrière-arrière-arrière-petits-enfants.
___________________________ par Florence Saugues, Paris-Match, 2 octobre 1997.
La doyenne de l'humanité s'est éteinte à l'âge canonique de 117 ans.
La québécoise Marie Louise Febronie Meilleur, née le 29 août 1880 à Kamouraska, s'est éteinte hier à l'âge de 117 ans. Même si elle n'a pas atteint le record de 122 ans détenu par la française Jeanne Calmen, on ne comptait plus le nombre de ses petits enfants, neveux et nièces. Recherche par Paul Meilleur, de Ste-Adèle QC Mise à jour le 5 octobre 2003 par Paul Meilleur, de Ste-Adèle QC
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