Biographie Poirier Jean-Baptiste
Jean-Baptiste Poirier, quand il était mineur, s'est marié à la gaumine avec Charlotte Boyer. Lorsque Jean-Baptiste a eu ses 21 ans, ils se sont mariés à la régulière, le 15 septembre 1733, Ste-Anne de Bellevue.
Qu'est-ce qu'un mariage à la gaumine? En 1759, l'ordonnance de Blois faisait passer dans la législation civile les prescriptions du concile de Trente relatives à la clandestinité. En vertu du décret Tametsi, les mariages devaient être célébrés en présence du curé et de deux témoins, à peine de nullité.
En France, on était peu fait à cette législation et on chercha à l'éluder par la ruse. La plus usitée de ces ruses fut le mariage à la gaumine, du nom d'un certain Gaumin, le premier qui se maria de cette façon. Les prétendus conjoints se rendaient à l'église pendant la messe du curé de la paroisse, accompagnés de deux témoins, et là proclamaient qu'ils étaient mari et femme, sans autre cérémonie.
La législation civile employa tous les moyens en son pouvoir pour prévenir ces mariages illicites. Elle édicta même des peines sévères contre les contractants et leurs complices.
Cette coutume gagna la Nouvelle-France dès les premières années du 18e siècle. Elle devint même en vogue, puisque, le 24 mai 1717, Mgr de Saint-Vallier était obligé de lancer un mandement pour la condamner et frapper d'excommunication ceux qui oseraient contracter de tels mariages. L'évêque de Québec disait (entre autres):
....mais nous avons appris depuis peu, avec une extrême douleur, par la sentence qui a été déjà rendue par notre offîcial et par les plaintes de nos missionnaires et curés, que plusieurs jeunes gens, au mépris des lois civiles et ecclésiastiques, contre le respect dû à l'église et à leurs propres parents, avaient trouvé, par l'instigation du démon, une manière détestable de contracter des mariages, qu'ils appellent à la gaumine, en se présentant devant leur curé, ou autre prêtre, pour le prendre à témoin du prétendu mariage qu'ils veulent contracter, sans les cérémonies de l'Église et souvent malgré leurs parents et à leur insu.
... À ces causes, ayant égard à la requête de notre promoteur, et aux autres remontrances qui nous ont été faites, nous déclarons excommuniés, d'une excommunication encourue par le seul fait, et dont nous réservons à nous seul le pouvoir d'absoudre, tous ceux qui dans la suite oseront contracter de si détestables mariages, soit devant leur curé, soit devant d'autres prêtres, soit séculiers, soit réguliers; ceux aussi qui seront assez méchants pour le conseiller, tous les témoins apostés pour les dits mariages, et les notaires qui en dresseraient l'acte, sauf à notre official, dans les cas particuliers qui seront portés devant lui, d'imposer encore d'autres peines particulières pour punir les prévaricateurs.
La menace d'excommunication de Mgr de Saint-Vallier arrêta presque net les mariages à la gaumine. Après 1717 on n'en voit que de très rares cas.
Roland Grenier
Joseph Poirier (ID 22245) plaignant, le père de Jean-Baptiste Poirier (ID 62759), intenta un procès à son fils Jean-Baptiste, mineur, en l'accusant de scandale suite à un mariage à la gaumine.
28 juillet 1732 - 23 août 1732
Ce dossier de matière criminelle est composé des pièces suivantes : 12 document(s) textuel(s)
- l'information judiciaire, concernant un scandale survenu à l'église de Sainte-Anne de Bellevue alors que Jean-Baptiste Poirier et Charlotte Boyer déclarèrent à haute voix qu'ils se prenaient pour mari et femme alors que le prêtre élevait l'hostie consacrée ;
- la communication au procureur du roi, lequel requiert la prise de corps contre Jean-Baptiste Poirier ;
- le décret de prise de corps ;
- la signification ;
- plusieurs procès-verbaux relatant les recherches pour trouver l'accusé, Jean-Baptiste Poirier ;
- les perquisitions ;
- la plainte de Joseph Poirier contre son fils Jean-Baptiste, mineur, pour avoir déserté le foyer familial et l'avoir abandonné depuis plus d'un an pour aller vivre et travailler chez le père de Charlotte Boyer dont il s'est amouraché et avoir fait des tentatives pour se marier à l'insu du plaignant ;
- le paternel, Joseph Poirier a lui-même conduit son fils Jean-Baptiste en prison ;
- l'ordonnance de comparution à Charlotte Boyer ;
- la requête de Joseph Poirier pour faire élargir son fils Jean-Baptiste de prison, vu qu'il en a besoin urgent pour travailler à ses récoltes ;
- la communication au procureur du roi, lequel n'empêche pas la libération, sujet à caution ;
- le brouillon de la sentence ;
- la sentence qui condamne Jean-Baptiste Poirier à 75 livres de réparation envers l'église de Sainte-Anne et défend à ce dernier et Charlotte Boyer de se voir et de se fréquenter jusqu'à ce que l'official se prononce sur la validité de leur mariage ;
- le mémoire des frais ;
- la soumission de caution judiciaire Montréal par Guillaume Robidou et Joseph Poirier.
Les témoins sont
- Jean Matis, prêtre et curé de Sainte-Anne, âgé de 31 ans ;
- Jean de Lalonde, de Baie d'Urfée, âgé de 60 ans ;
- Pierre Leger dit Poitevin, de Vaudreuil, âgé de 46 ans.
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