Biographie Casault Francois
CAZEAU, FRANÇOIS, marchand, né vers 1734 à Saint-Cybard, France, fils de Léonard Cazeau et d’Anne Aupetit ; le 14 mai 1759, il épousa à Montréal Marguerite Vallée, et ils eurent six enfants ; décédé le 11 mai 1815 à Paris. François Cazeau arrive en Nouvelle-France quelques années avant la Conquête et s’installe vraisemblablement à Montréal. Il devient par la suite commerçant de fourrures et traite à Michillimakinac (Mackinaw City, Michigan). Ses affaires semblent aller bon train, puisqu’en 1763 il déclare posséder 19 777# en monnaie de cartes. En 1774, Cazeau sympathise avec la cause américaine en diffusant dans la région de Montréal la Lettre adressée aux habitans de la province de Québec, ci-devant le Canada, imprimée pour le compte du premier Congrès continental par Fleury Mesplet*, qui demeure alors à Philadelphie. Pendant l’invasion du Canada [V. Benedict Arnold ; Richard Montgomery*], Cazeau approvisionne les troupes américaines, héberge à l’occasion des officiers rebelles et s’active en distribuant les messages du Congrès parmi la population canadienne. En 1777, il achète trois grands bateaux qu’il fait charger de provisions, de vêtements et de nourriture, destinés à ravitailler les troupes américaines cantonnées au fort Ticonderoga (près de Ticonderoga, New York). Mais l’armée britannique, arrivée en force dans cette région, capture puis coule les bateaux de Cazeau. Celui-ci n’en continue pas moins d’appuyer les Américains. Ainsi, en mai 1779, il assure la distribution, dans toute la province de Québec, de la proclamation du comte d’Estaing, vice-amiral de la flotte française, qui invitait les Canadiens à se soulever contre l’Angleterre. L’année suivante, Cazeau est accusé de trahison ; le gouverneur Haldimand ordonne son arrestation et le fait incarcérer au couvent des récollets à Québec. À l’automne de 1780, les marchands londoniens Brook Watson et Robert Rashleigh réclament la vente par le shérif de ses propriétés. En 1782, Cazeau s’évade et se réfugie aux États-Unis. Dès l’année suivante, il demande aux autorités de la province de Québec de lui accorder le droit de visiter sa famille. Haldimand acquiesce à sa requête, et Cazeau revient au pays où il collectionne divers documents attestant ses activités proaméricaines pour étayer sa demande d’indemnité auprès du Congrès en remboursement des pertes qu’il a subies pendant l’invasion. À l’automne, il retourne aux États-Unis où il entreprend des démarches auprès du Congrès pour obtenir gain de cause. Ballotté de bureaux en bureaux, de fonctionnaires en fonctionnaires pendant plus de quatre ans, Cazeau ne soutire que de vagues promesses. Il décide de s’embarquer pour la France à l’automne de 1786. Cazeau continue de présenter requêtes sur requêtes demandant l’aide du gouvernement français pour obtenir le remboursement de ses créances. Mais la Révolution retarde le dénouement de cette affaire. Cependant, en 1792, l’Assemblée législative française prend connaissance du dossier et appuie Cazeau dans ses démarches auprès du Congrès américain. En 1801, ce dernier lui octroie 2 240 acres de terre dans l’état de New York. Sur les instances de l’un de ses fils, Cazeau revient aux États-Unis et recommence à pétitionner auprès du Congrès demandant un remboursement en espèces plutôt qu’en terres. Aussi ne réclame-t-il pas ses 2 240 acres et, après avoir entrepris vainement d’autres démarches, il retourne en France en 1802. Vieilli, malade, pauvre et seul, François Cazeau n’en continue pas moins de réclamer son dû à cor et à cri. Mais rien n’y fait, et il meurt le 11 mai 1815 sans avoir obtenu gain de cause. Son dossier continuera de traîner devant les tribunaux, mais les héritiers, eux non plus, n’y gagneront rien. Jean-Francis Gervais ANQ-M, CE1-51, 14 mai 1759.— APC, MG 23, B19.— La Gazette de Québec, 27 août 1776, 3 août 1780.— Tanguay, Dictionnaire, 2.— Wallace, Macmillan dict.— Corinne Rocheleau-Rouleau, « Une incroyable et véridique histoire : l’affaire Cazeau, 1776–1893 », Soc. hist. franco-américaine, Bull. (Boston, Mass.), 1946–1947 : 3–31.— Benjamin Sulte, «François Cazeau », BRH, 22 (1916) : 115–120. Bibliographie générale © 1983–2014 Université Laval/University of Toronto
HISTOIRE DE NOS FAMILLESDe Saint-Eustache à Washington | La maison de William Smith au 196, de la rue Saint-Eustache en 1905 |
Lorsque nous tentons de retracer l'histoire d'une famille, il faut parfois chercher à de grandes distances. Certains de nos ancêtres, pensons aux coureurs des bois, étaient de grands voyageurs et nous pouvons souvent suivre leurs traces très loin de leur foyer. D'autres fois, rien ne nous laisse présager que des informations puissent exister à l'étranger sur des habitants d'ici. L'exemple suivant le démontre bien.
Les archives du Sénat des États-Unis, à Washington, conservent un document curieusement intitulé «Report of the Committee of Claims to whom was referred the petition of William Smith, of the Parish of St.Eustache, District of Montreal», daté du 12 avril 1826. Mais qui était donc ce William Smith de Saint-Eustache et que faisait-il à Washington? Et pourquoi présentait-il une requête au Sénat américain? Revenons un siècle en arrière. En 1734 naît à Saint-Cybard, en France, François Cazeau, fils de Léonard Cazeau et d'Anne Aupetit. Avant la chute de la Nouvelle-France, il émigre à Montréal et y marie Marguerite Vallée en 1759. Il fait le commerce des fourrures avec le fort de Michillimakinac, sur les rives du lac Michigan, et y amasse une fortune appréciable. En 1774-1775, les États-Unis sont en effervescence. Les évènements préparent à la déclaration d'indépendance qui aura lieu en 1776. François Cazeau sympathise avec les rebelles d'outre frontière et distribue leurs pamphlets à Montréal. Lorsque les Américains envahissent le Bas-Canada en 1775-1776, il les appuie et devient, en tant que marchand, un de leurs principaux fournisseurs montréalais. Il arme trois bateaux, qui doivent aller ravitailler les Américains, mais ils sont tous coulés par l'Angleterre, avant même d'avoir pu livrer leurs marchandises. Les choses tournent mal pour Cazeau: les Américains repartent, sans avoir pu convaincre les Canadiens de se joindre à leur révolution contre l'Angleterre. Cazeau, qui a beaucoup investi dans leur cause, se met à réclamer compensation du Congrès américain. Les choses traînent cependant en longueur et il ne peut obtenir satisfaction. Entre-temps, il est arrêté et mis en prison par l'armée anglaise. En 1782, il s'évade, se réfugie d'abord aux États-Unis, puis en France, où il meurt en 1815. Mais William Smith de Saint-Eustache, que vient-il faire dans toute cette histoire? François Cazeau et Marguerite Vallée ont six enfants, dont une fille prénommée Marguerite, qui a épousé un marchand protestant de Saint-Eustache, William Smith. Ce dernier habite le village. En 1810, il achète la succession du docteur Charles Greisingher, une propriété rue Saint-Eustache. En 1814, il s'y fait construire une longue maison en pierre que nous pouvons toujours voir au 196 de la rue Saint-Eustache, à côté du stationnement de la Caisse populaire. En plus d'être marchand, Smith est aussi opérateur du moulin. En 1824, il loue du seigneur Dumont le moulin du Bois-blanc, à la Fresnière. En 1829, le bail du moulin est renouvelé pour neuf ans, mais cette fois au nom de son épouse, Marguerite Cazeau. Les affaires ne vont cependant pas très bien pour eux puisqu'en 1830, leurs biens sont saisis en justice et la maison de la rue Saint-Eustache est vendue à l'encan par le shérif. Après la mort de François Cazeau en 1815, ses enfants ont continué ses tentatives pour obtenir réparation du Congrès américain, pour les torts subis en 1775-1776. C'est dans le cadre de ces démarches que William Smith «of the Parish of St.Eustache» présente, le 12 avril 1826, sa requête au Sénat des États-Unis, à Washington. Malheureusement pour eux, ces démarches demeureront sans succès. Voilà donc comment un vieux document, à 650 kilomètres de son lieu d'origine, a pu jeter un peu de lumière sur une famille de Saint-Eustache, il y a près de 200 ans! Quelques références:
- Report of the Committee of Claims to whom was refered the petition of William Smith, of the parish of St. Eustache, in the District of Montreal, in Lower Canada, attorney for all the heirs of the late Francis Cazeau. Washington, Senate of the United States, 19th Congress, 1st Session, 12 avril 1826, 24 pages.
- Dictionnaire biographique du Canada, Sainte-Foy, Presses de l'Université Laval, 1983, vol. 5, pages 191-192: François Cazeau.
Recherche et texte: Marc-Gabriel Vallières Société de généalogie de Saint-Eustache
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