Biographie Paquet Salomon-Gerard
Père Salomon-Gérard PÂQUET, o. m. i. (1897-1966)
Salomon naît à Saint-Ulric de la Rivière-Blanche, le 27 mars 1897. Septième enfant de Norbert Pâquet et d’Emma Ouellet, il reçoit le baptême le jour suivant. Il a cinq ans, lorsqu'il quitte Saint-Ulric de Matane pour s'établir, avec sa famille, sur les bords de la rivière Humqui à St-Benoît-Joseph-Labre d'Amqui, dans la vallée de la Matapédia.
Jeune, Salomon est un peu casse-cou, selon sa sœur Marthe, il aimait tout essayer. La famille se souvient du petit incident de la rivière alors que, marchant sur les billots, il tomba dans l'eau. (Voir texte de Norbert). En parlant de son frère, Clara déclare : «Ce frère tant aimé et choyé. Frère dévoué, affable, joyeux qui aimait faire rire et semer autour de lui gaieté et bonheur.» Ce frère, « était certainement marqué de la main de Dieu et de son regard tout divin puisque par trois fois, il fut épargné "miraculeusement" dirait-on.»
Un dimanche, alors que la circulation est impraticable, le grand-père Étienne Pâquet s'abstient d'aller à la messe. Celui-ci est loin de se douter que sa présence dans la maison, cet avant-midi là, serait tant appréciée de sa bru Emma Ouellet. Le gros poêle à deux ponts, en plein service dans la cuisine, se détache du milieu. Le pont du haut renverse sur bébé Salomon le couvrant complètement par l'ouverture du devant. En toute hâte, la mère et le grand-père soulèvent le «mastodonte» et constatent avec étonnement et soulagement que le jeune Salomon n'a subit que des brûlures sur une jambe et un pied. Comme au fer rouge, Salomon restera «marqué» toute sa vie de cet incident. «Miracle» dira-t-on. Après ses vacances d'été et un retour aux études au séminaire, voilà que la maladie se déclare. Une bosse à son cou est dianostiquée par les médecins comme «une glande tuberculeuse». Il rentre à la maison mais Dieu veille spécialement sur lui. On prie et sa santé revient. «Miracle» dira-t-on encore. Après quatre années passées dans les camps de concentration allemands à côtoyer la mort et la souffrance tant morale que physique, Dieu l'épargne encore. Miracle dira-t-on pour la troisième fois.
En 1911, Salomon est à Rimouski, d'abord au petit séminaire jusqu'en 1920, et au grand séminaire pour les deux prochaines années. Le 14 août 1922, il entre au noviciat de Ville Lasalle, et fait profession le 15 août 1923. Le mercredi, 17 février 1926, il est au scolasticat Saint-Joseph, avenue des Oblats à Ottawa, pour y faire son oblation perpétuelle. Le 26 mai de la même année, il est ordonné prêtre dans cette ville par Mgr Guillaume Forbes, archevêque d'Ottawa.
Le 11 février 1926, quelques jours avant son oblation, il écrit à sa mère. Dans sa lettre, il lui avoue que c'est en grande partie grâce à elle si dans quelques jours il devient Oblat. C'est grâce à ses prières d'abord et à toutes ces lectures sur la vie des saints qu'elle lui faisait lire étant jeune. Il dit que tous les bons sentiments que ces exemples de saints lui ont donnés, il ne les a jamais complètement oubliés. «Ce sont tous les sentiments de cette sorte que vous m'avez mis dans le cœur, qui m'ont fait décider d'être religieux et qui ont préparé le champ à la grâce de Dieu. Je peux donc dire que je suis deux fois votre Oblat. D'abord parce que je suis votre enfant et ensuite parce que vous m'avez donné une âme d'Oblat. Il ajoute « J'aime a me rappeler comment vous m'avez approuvé, encouragé et aidé quand le bon Dieu m'a demandé de quitter le Séminaire pour venir ici ».
Dans sa communauté des Oblats de Marie Immaculée, Salomon est appelé le Père Gérard (Gérard-Salomon). En 1927, il part pour le Lesotho (nouveau nom pour Basutoland), en Afrique. Professeur aux petit et grand séminaire de Roma jusqu'en 1933, il est successivement directeur à Rafolatsane en 1933-1934, directeur à Phamong (Bethel) en 1934-1935, supérieur à Mazénod et éditeur du journal «Moeletsi» de 1936 à 1939.
En 1939, après douze ans passés en Afrique, région du monde pour qui il a une grande affection, le Père Gérard-Salomon vient en vacance dans son beau pays natal. Surprit par la guerre (1939-1945), il doit retarder son retour en Afrique. En attendant, il est décidé que le groupe des jeunes prêtres désignés pour le Sud-Afrique réside au scolasticat St-Joseph (Ottawa). Le 13 août 1940, le Père Salomon reçoit une lettre du R. P. Eugène Guérin, o.m.i., vice - provincial lui annonçant qu'il sera le principal cicérone de ces jeunes frères dans ces avenues nouvelles. « Par la présente vous êtes nommé professeur de sésotho et de pastorale missionnaire avec résidence au scolasticat d'Ottawa». Le matin du 27 février, le père Pâquet reçoit l'annonce de la présence à New-York d'un vaisseau neutre égyptien, le Zam-Zam, en partance prochaine pour l'Afrique du Sud. Le soir du 17 mars, c'est l'adieu définitif à la gare Bonaventure de Montréal. Le lendemain à 11 heures 30 de l'avant midi, les dix-sept missionnaires montent à bord du navire amarré au quai Hoboken à Jersey City. Le départ n'a lieu que le 20, à 21h45.
Au matin du 17 avril, vers les six heures, le bateau qui conduit le Père Salomon et ses compagnons en Afrique, est coulé par les Allemands. C'est à bord du Tamesis que tous les rescapés du Zam-Zam sont rapatriés. Le lendemain, les survivants du naufrage prennent place à bord du Dresden, navire d'un tonnage égal à celui du Zam-Zam.
Le matin du 20 mai, le Dresden entre dans la baie de Saint-Jean-de-Luz, port français sis au pied des Pyrénées, à la frontière franco-espagnole. Les passagers américains reçoivent le message «de préparer leurs bagages et de se tenir prêts à descendre dans une demi-heure. Ils sont libre…». Les trente-cinq passagers «britanniques» et l'équipage égyptien demeurent à bord. Ils seront conduits à Bordeaux. Le 23 mai, à 16 heures, les prisonniers débarquent. Ils sont accueillis par «un rigide cordon de gardes allemands armés de pied en cap.» Après avoir subit une nouvelle fouille, ils prennent place dans sept autobus, qui les conduits au camp de concentration de Saint-Ménard-en-Jalles. Le 31 mai à 10 heures de l'avant-midi, sac au dos, les passagers du Zam-Zam se mettent en marche vers la gare, située à huit ou neuf milles du camp. Le train les conduit dans la région de Hambourg, en Allemagne du Nord. Le compartiment qui échoit aux missionnaires catholiques a dix pieds de longueur sur sept et demi de largeur, y compris les quatre banquettes de bois dur où ils devront s'asseoir. Durant cinq jours et cinq nuits, les dix-sept missionnaires se partagent l'espace restreint par les bagages.
Pendant la marche, de la gare au camp, en rang de cinq entre deux haies de soldats armés, «Le père Pâquet trouve néanmoins l'énergie d'égayer son groupe en cours de route. Une de ses histoires, en plus de provoquer le rire des confrères, fera mordre la poussière à un officier allemand.» Le frère Parent ne voulant pas manquer l'histoire du père Pâquet, se retourna sans regarder où il marchait. Il ne vit pas venir un officier et n'entendit pas le timbre de sa bicyclette qu'il pressait pourtant avec force. Il l'accrocha au passage et l'officier tomba à la renverse. Des cris affluèrent de toute part. Le frère Parent en fus quitte pour la peur.
Une citation du frère Cournoyer tirée du livre «La perle au fond du gouffre» résume bien notre cher oncle le père Salomon-Gérard. «Le père Pâquet a toujours su nous égayer et semer la joie parmi nous. Lui-même s’est montré gai et affable avec tout le monde; malgré cela, j’ai été témoin bien des fois des nombreux affronts qu’il lui fallut supporter de la part des Allemands ou des prisonniers anglais avec qui nous étions. J’ai entendu des gens lui parler grossièrement et durement, et pas une seule fois il n’a essayé d’élever la voix pour se défendre, alors qu’il avait parfaitement raison. Aussi, combien de gens n’a-t-il pas gagnés par son humilité, sa douceur et sa grande charité!»
«Partis de Montréal le 12 février à destination de l'Afrique du Sud, nos dix-sept missionnaires du Zam-Zam aboutissent, le 5 juin, après douze semaines du plus capricieux et du plus tragique itinéraire de mer et de terre, à un camp d'internement de l'Allemagne du Nord. Ils sont prisonniers des nazis.»
Après son emprisonnement dans les camps de concentrations allemands, le Père Salomon revient au pays. Il profite de son séjour pour célébrer entre autre le mariage de ses neveux et nièces. De retour en Afrique en 1947, il est de nouveau supérieur à Mazenod et s'occupe du journal. De 1949 à 1955, il devient maître des novices et supérieur à Quthing (Villa-Maria) et assistant de 1955 à 1957. De 1957 à 1958, il est directeur du grand séminaire de Roma. En 1958, pour la dernière fois, il revient au Canada. Il est de retour à Quthing, en 1960.
Le Père Salomon s'éteint après une courte maladie, le 18 octobre 1966, à 11 heures 25 de l'avant midi. Les funérailles ont lieu le 20, à la paroisse oblate de Mazenod. Son corps repose dans le cimetière oblat près de la Maison Provinciale.
Dans une lettre adressée à la famille Pâquet, le père Philippe Boisvert, o.m.i. Provincial écrit «Ces derniers temps, il nous parlait de son voyage chez le Bon Dieu et nous invitait à ses funérailles, en semblant blaguer, mais personnellement je crois qu'il pressentait sa fin.»
Voici quelques extraits d'une lettre de L.G. Magnan, o.m.i. adressée à la famille Pâquet d'Amqui. «Aujourd'hui je vous écris ces quelques lignes pour vous dire combien je partage votre douleur, et comme j'aimerais être auprès de vous pour vous apporter consolation et réconfort. Le père Pâquet a été mon premier supérieur quand je suis arrivé au Basutoland en 1951. J'ai travaillé un peu plus d'un an avec lui. En janvier de cette année j'avais la joie de le retrouver ici quand j'ai été nommé supérieur de cette maison. C'était une joie de travailler avec lui. Il était si bon compagnon, si jovial, si charitable, si dévoué… Le froid de l'hiver l'a fait souffrir plus que de coutume. Une visite chez le médecin semblait l'avoir bien encouragé. Cependant il se sentait toujours un peu fatigué. Le 16 septembre je le conduis à notre ferme dans l'état Libre d'Orange, près de la frontière du Basutoland. Il apporta avec lui des livres pour travailler. … De l'endroit ou (sic) il se trouvait il pouvait facilement assister aux fêtes de l'indépendance du Basutoland. Mais hélas les événements prirent une autre tournure. Quelques jours après, un de ses grands amis, Mgr Mabatoana mourrait soudainement. Il l'avait salué le matin même avant le départ de celui-ci pour une réunion d'évêques. Ce fut une bien pénible nouvelle pour lui. Quelques jours après on le conduisait à l'hopital (sic). C'est là que je le vis pour la dernière fois. Il était bien changé. Il était bien pâle et bien faible. Les traitements ne purent le ramener. … J'ai eu la consolation d'assister aux funérailles avec la majorité des membres de notre communauté et de prendre part à la messe concélébrée, messe présidée par l'évêque de Léribé Mgr. I. Phakoe, o.m.i., un de ses anciens novices. »
Biographie tirée du livre "Norbert Pâquet et Emma Ouellet, d'Isaac à Norbert, de René à Emma" par Pierre Bérubé et Claire Gaudette, 2003)
Photos tirées du livre " La perle au fond du gouffre" d'Eugène Nadeau, o.m.i., (préface de Salomon-Gérard Pâquet)
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