Biographie Beaupre Edouard
BEAUPRÉ, ÉDOUARD, dit le géant Beaupré,
homme fort et figure légendaire, né le 9 janvier 1881 à Willow Bunch
(Saskatchewan), aîné des 20 enfants de Gaspard Beaupré, originaire de L’Assomption, Québec, et de Florestine Piché,
Métisse qui, avec une soixantaine de familles de la Rivière-Rouge
(Manitoba), se réfugia à Willow Bunch durant la rébellion de 1870 ;
décédé le 3 juillet 1904 à Saint Louis, Missouri.
Selon la légende, Édouard Beaupré
pesait entre 9 et 14 livres à sa naissance. Jusqu’à l’âge de sept ans,
sa croissance fut normale, mais, peu après son entrée à l’école, il se
mit à grandir rapidement. À 9 ans, il mesurait près de six pieds, à 12
ans, il atteignait six pieds six pouces et à 17 ans, sept pieds un
pouce. Il fréquenta l’école irrégulièrement pendant quatre ans. Son
éducation demeura rudimentaire et, selon un article paru en 1967, « on
alléguait même dans son entourage qu’il était aussi insignifiant que
long ». Malgré tout, il n’était pas sot. Il apprit à converser en
français, anglais, cri, sioux et « michif ».
À l’adolescence, Beaupré
était un jeune homme timide, un peu naïf et d’un mutisme déconcertant.
Il se sentait à l’aise non pas sur les bancs de l’école, mais au grand
air sur les ranchs des environs de Willow Bunch, où il apprit à manier
le lasso en compagnie de deux cow-boys de la région, Johnny Chartrand
et John Savary. Malheureusement, il dut abandonner son métier à l’âge
de 17 ans car, selon la tradition, lorsqu’il montait à cheval ses pieds
touchaient le sol. C’est vers cette époque qu’il reçut une violente
ruade de cheval en plein visage. Il eut le nez brisé et il est fort
probable que d’autres os furent fracturés. Cet accident le défigura et
sa physionomie ingrate, combinée à son gigantisme, contribuèrent à
aggraver son sentiment d’insécurité.
Beaupré
entreprit alors, sous la tutelle d’un Métis de Willow Bunch, André
Gaudry, la tournée de plusieurs villes canadiennes où il effectuait des
tours de force, levant un cheval de 600 livres sur ses épaules et
pliant des barres de fer. Entre les tournées, il rentrait toujours à
Willow Bunch. Mais le profit réalisé au cours de ces voyages était
plutôt mince et il devait constamment reprendre la route. Il visita
plusieurs villes de l’Est américain puis se rendit en Californie, où il
vécut un an. La solitude et l’ennui qui le rongeaient entre les
spectacles le poussèrent vers l’alcool, habitude qui le mena souvent à
des excès.
Beaupré retourna dans l’Est et, avec
son père, visita, entre autres, la ville de New York avant de rentrer à
Montréal, où il affronta dans un combat l’homme fort du Québec, Louis
Cyr*, le 25 mars 1901, au parc Sohmer. Cyr l’emporta facilement, mais
les partisans du géant Beaupré prétendirent qu’il était déjà miné par
la tuberculose et qu’il n’était que l’ombre de lui-même.
Beaupré
décida alors de reprendre son métier de cow-boy et s’installa sur un
ranch au Montana. Toutefois, la tuberculose avait sapé sa force et son
endurance, et son état de santé l’obligea à abandonner son emploi. Il
repartit en tournée, cette fois avec le cirque Barnum and Bailey. C’est
à l’occasion d’une représentation à l’Exposition universelle de Saint
Louis qu’il s’effondra et mourut d’une hémorragie pulmonaire massive, à
l’âge de 23 ans, le 3 juillet 1904. À son décès, il mesurait huit pieds
trois pouces et pesait 375 livres. Le géant Beaupré était affecté de
gigantisme hypophysaire. Sa taille le placerait au cinquième rang de
tous les géants qui ont existé.
À la suite d’une
autopsie, le corps de Beaupré fut remis aux entrepreneurs Eberle and
Keyes pour être embaumé et enterré. La dépouille devait être expédiée à
Willow Bunch, mais la famille, très pauvre, ne pouvait payer les frais
de transport. Les entrepreneurs décidèrent de récupérer leurs dépenses
en exhibant le corps dans la vitrine d’un magasin. Les autorités
policières intervinrent pour interdire ce genre de spectacle. Pascal
Bonneau, homme d’affaires de Willow Bunch, se rendit à Saint Louis et
fit transporter le cadavre jusqu’à Montréal, où il fut exposé durant
plus de six mois dans l’entrée du musée Éden. L’affluence des curieux
était si considérable que les autorités municipales mirent un terme aux
visites.
Au printemps de 1907, des enfants trouvèrent
le cadavre d’Édouard Beaupré dans un hangar du parc Bellerive, à
Montréal. Il semble que le cirque qui l’exhibait l’avait abandonné
après avoir fait faillite. Le corps fut transporté au département
d’anatomie de l’université de Montréal et soumis à un procédé spécial
de momification. Le géant fut ensuite exposé dans une espèce de châsse
vitrée à la faculté de médecine jusqu’au milieu des années 1970.
Finalement, plus de 85 ans après sa mort, à la demande de membres de sa
famille, le géant Beaupré fut incinéré et enterré à Willow Bunch, le 7
juillet 1990.
André N. Lalonde
Saskatchewan Arch. Board
(Regina), 2.507 ; E1054.— J.-M. Blais, « Men and books : Édouard
Beaupré, 1881–1904 », Assoc. médicale canadienne, Journal (Toronto), 96
(1967) : 1647–1653.— Commission culturelle fransaskoise, le Géant
Beaupré (Regina, 1986).— Richard Lapointe, 100 noms : petit
dictionnaire biographique des Franco-Canadiens de la Saskatchewan
(Regina, 1988).— Clovis Rondeau et Adrien Chabot, Histoire de Willow
Bunch (Gravelbourg, Saskatchewan, 1970), 266–273.
(Texte envoyé par Ginette Arpin, participante à Généalogie du Québec)
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